vendredi 18 décembre 2015

20 ans de silence sur les 8 millions de morts au Congo


La bataille se passe désormais sur les corps des femmes, des enfants et hier sur les corps des malades qui ont été égorgés sauvagement le dimanche 29 novembre 2015 à l’Est de la République du Congo.
En fait, depuis 1994 lors du génocide de 800 mille rwandais, l’Est de la République Démocratique du Congo fut un lieu d’accueil pour les réfugiés venant du Rwanda (1,5 million des réfugiés civils et militaires traversent la frontière). C’est fut malheureusement aussi le début du calvaire pour les populations du Kivu (à l’Est du Congo)
Je me souviens encore. J’avais 16 ans. Et je vivais à Beni. Beni qui est maintenant une ville martyre qui voit couler jour et nuit le sang de ses filles et fils. Oui, j’avais 16 ans et les congolais qui sont dans la salle peuvent en témoigner : nous avons alors assisté à l’invasion massive de nos territoires par les rwandais et les ougandais sous prétexte de chasser les réfugiés hutus alors présents au Congo. Pourquoi venir pourchasser ces réfugiés au-delà de leurs frontières ? Cette question demeure depuis longtemps nébuleuse. Et ce sera à cette même occasion que ces envahisseurs appuieront l’opposant – rebelle  congolais Laurent Désiré Kabila à 1997 à renverser le règne de 32 ans au pouvoir du dictateur Mobutu Seseseko président du Zaïre. Avec  Laurent Désiré Kabila, le Zaïre deviendra La République Démocratique du Congo.
Et depuis ce temps, le but de la présence rwandaise et ougandaise sur le sol congolais demeure flou. Au lieu de pourchasser les réfugiés hutus rwandais, on assiste plutôt à des guerres ethniques ou civiles, aux massacres, aux viols sexuels systématiques, aux pillages de ressources minières dont le coltan matière indispensable pour les téléphones et d’autres appareils intelligents, on assiste aux enlèvements (juste pour l’année dernière on enregistre plus 800 personnes kidnappées, dont ma grand-mère et trois prêtres assomptionnistes), on assiste aussi maintenant aux égorgements à l’arme blanche. Plus de 600 personnes égorgées. À qui profite ce crime ? À qui profite ce génocide ?
Toutes ces atrocités se passent sous silence. Personne ne veut parler pour cette fille violée plus 7 fois. Ni les médias, ni le gouvernement congolais, ni la communauté internationale, sauf quelques voix qui se lèvent : dont le parlement de Québec qui a voté à l’unanimité l’année dernière une motion qui condamne les massacres du Congo. Bravo et félicitation !
Avant, j’étais gêné et timide de parler du Congo. Cependant, lorsque j’essaie d’en parler aux québécois et québécoises, je me sens soutenu et écouté. Il me semble alors qu’il est temps de briser le silence, ensemble avec vous ! Il n’est jamais trop tard de parler pour cette femme violée. Il n’est jamais trop tard de faire apprécier la vie à ces jeunes nés dans la guerre… Il n’est jamais trop tard de poser un petit geste. Il n’est jamais trop tard. Bon cinéma !
Fr. Gaston Mumbere,

Prêtre Assomptionniste      Québec, le 9 décembre 2015

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