vendredi 13 mai 2016

Blood flows in the Beni territory : A genocide looms !



Object : Blood flows in the Beni territory : A genocide looms !

Mr.  President,

How are you this morning ! I do not know how to go about writing to Mr. President of the Congo.. Whatever! I imagine the daily life of every human being does not eclipse itself because of his high responsibilities. Yes, Mr. President of the Republic? Everyone is in agreement. I testify to this because I myself voted for you! But first of all, you are a man. You breathe, you eat, you drink. You have a wife and children. You are a man. You experience moments of joy and moments of suffering. The exaltation, the glory, the suffering, the fragility, the finite rhythm punctuate the life of women and men on earth.

Women and men! They are not eternal. They die. The strongest can live beyond 80 years. Anyway men must die. No one escapes this. This is the indispensable finiteness. Given this reality, as a human, I have several questions arising from an apparent cruel banality (massacres, rapes, kidnappings, slaughters) suffered by populations in the east of the Democratic Republic of Congo . Why kill children who have not yet lived to the fullest? Mr. President, this is not fiction! The images are atrocious. They are in plain sight. Children crushed with hammer blows. It's not just children. Adults are also bound and their throats cut. Numerous are the men like you who are crushed by death. These women, like your wife, who are raped and assassinated. The bodies of their children lie in the blood that is flowing on the red soil of Beni. The most recent case happened yesterday (May 3, 2016) as reported by the radio motor of Oïcha:

"Sixteen persons killed with hatchets, axes and knives and other fire arms, this is the provisional toll of the raid of Ugandan rebels of the ADF alleged in the village of MINIBO, in the resort of BAUNGATSU-LUNA close to that of Eringeti. According to sources at the local level, the murders took place near the Nepalese peacekeepers MONUSCO position in Eringeti. The FARDC were well warned by the population. But they intervened after the enemy fled to an unknown destination. Note that the operation began at around 18 pm on Tuesday to Wednesday evening, May 4th. Recall that since last Monday, 21 people, including 6 of the same family who were in a place of mourning LESE were removed. So far the people of this village are questioning themselves on the destination and the fate of the hostages. The local notability deplores the inaction of the army to protect the population. Published Wednesday, May 4, 2016 "

Dear President of the Republic, I know you are a politician. You hold to the project of your political party. The project ! This is the security, development, education, health, elections ... peace. A project for the whole Republic. Even a project for the territory of Beni, and Lubero. Also a project for the East of the Republic.
Moreover, I know that you are overwhelmed by your presidential responsibilities and the agenda of your partners and political sponsors. You are therefore an important president. You have power. However, these scribbled lines for you, are aimed first at a man. A man of flesh and, occasionally experiencing the vagaries of finiteness and suffering. It is to this man that I write. Yes, he wears the hat of the president, but he remains human. I guess that the Presidency of the Republic does not take away his humanity.

I ask him to take an interest in what happens in Beni and in Kivu.  Would he consider a serious investigation for a proper justice? If this man to whom I write is president of the Republic, he is there to govern peoples. Yet the dead number themselves in the millions. 8 million deaths. And every day that number keeps growing. At this rate, you, this man can become the president of the dead, the president of the cemeteries, the president of mass graves. Dear Mr. President, Beni survivors and Kivu wonder if they are still part of the territory which you are supposed to govern ...

These survivors and their friends are still numerous. Everyone will write to you. Please take time to read their anxieties ... Can they still count on you? Are you still able and competent to hear these cries of Beni humans. If you are always competent but when you do not act, the logic of complicity risk that you be accused. Thank you for the attention you already gave to this letter.



Signed
Father Gaston Mumbere,
–Member of the congregation of the Augustinians of the Assumption (Congregation of Jean-Pierre Ndulani Edmond Bamtupe Anselmo Wsukundi kidnapped October 19, 2012 and of Father Vincent Machozi murdered because he had quoted you in the massacres in eastern Congo ,)
– Member of the Peace Movement in the Congo of Quebec

P.S. Here is what I write on the envelope: To the President of the Democratic Republic of Congo in Kinshasa. I hope my letter will reach its destination. Anyway, I am not worried Everyone is familiar with this country and its president. The country is now known. It is the world capital of rape. The letter should reach you well ...

La Population de l'Est du Congo, victime des massacres (Boniface Musavuli)

L'Est de la République Démocratique du Congo, très riche en ressources naturelles, est depuis 20 ans le théâtre d'une guerre qui a fait 6 millions de morts. Depuis un an et demi, la population de Beni et Lubero (province du Nord Kivu), est victime de massacres particulièrement cruels, face au silence des autorités congolaises et de la communauté internationale. Une situation dénoncée à plusieurs reprises par des prêtres et évêques de RDC, parfois au péril de leur vie (le père assomptionniste Vincent Machozi a été assassiné au mois de mars). Décryptage dans Églises du Monde avec Boniface Musavuli, congolais, analyste politique et militant des Droits de l'Homme.
Églises du Monde du 20/04/2016.

mercredi 4 mai 2016

Le sang coule sur le territoire de Beni (lettre au président de la République)


Monsieur le Président,
Comment allez-vous ce matin ! Je ne sais pas comment m’y prendre pour écrire à monsieur le président de la République. Peu importe ! Je m’imagine que la vie quotidienne de tout humain ne s’éclipse pas à cause de ses hautes responsabilités. Oui, Président de la République ? Tout le monde est d’accord. Je l’atteste parce que j’ai moi-même voté pour vous ! Mais avant tout vous êtes un homme. Vous respirez, vous mangez, vous buvez. Vous avez une femme et des enfants. Vous êtes un homme. Vous éprouvez des moments de joies ou des moments de souffrances. L’exaltation, la gloire, la souffrance, la fragilité, la finitude rythment la vie des femmes et des hommes sur terre.  

Des femmes et des hommes! Ils ne sont pas éternels. Ils meurent.  Les plus vigoureux peuvent vivre au-delà de 80 ans. De toute façon les hommes doivent mourir. Personne n’y échappe. C’est la finitude indispensable. Devant cette réalité, en tant qu’humain, je me pose plusieurs questions découlant d’une apparente banalité cruelle (massacres, viols, enlèvements, égorgements) dont sont victimes les populations à l’Est de la République dite Démocratique du Congo. Pourquoi égorger des enfants qui n’ont pas encore vécu ? Monsieur le président, ce n’est pas une fiction ! Les images sont atroces. Elles sont sous mes yeux. Les enfants broyés à coup de marteaux. Il n’y a pas que des enfants. Des adultes aussi sont ligotés et égorgés.
Ils sont nombreux ces hommes comme vous qui sont précipités dans la mort. Ces femmes, comme votre épouse,  qui sont violées et assassinées. Les cadavres de leurs enfants gisent dans le sang qui coule à flots sur la terre rougeâtre de Beni. Le cas le plus récent s’est passé hier (le 3 mai 2016) comme le rapporte la radio moto d’Oïcha :

«Seize personnes tuées à la machette, hache et autres armes blanches ainsi que des armes en feu, voilà le bilan provisoire de l’incursion de rebelles ougandais de l’ADF présumés, dans le   village MINIBO, dans la  localité de BAUNGATSU-LUNA, voisine de celle de ERINGETI. Selon des sources au niveau local, les meurtres se sont déroulés non loin de la position de casques bleus népalais de la MONUSCO à ERINGETI. Les FARDC sont intervenus et l’ennemi s’est enfui vers une destination inconnue. Signalons que l’opération a commencé autour de 18 heures le soir de mardi à mercredi le 4 mai. Rappelons que depuis lundi dernier, 17 personnes dont 6 d’une même famille qui étaient dans un lieu de deuil à LESE ont été enlevées. Jusqu’à présent les habitants de ce village s’interrogent sur la destination et le sort des otages. La notabilité locale déplore l’inaction de l’armée pour protéger la population. Publié mercredi 4 mai 2016 »

Cher président de la République, je sais que vous êtes un politicien. Vous tenez au projet de votre parti politique. Le projet ! C’est la sécurité, le développement, l’éducation, la santé, les élections… la paix. Un projet pour toute la République. Un projet même pour le territoire de Beni, de Lubero. Un projet aussi pour l’Est de la République.

En outre, je sais que vous êtes débordé par vos responsabilités présidentielles et l’agenda de vos partenaires et vos parrains politiques. Vous êtes donc un président important. Vous avez du pouvoir. Toutefois, ces lignes griffonnées pour vous, s’adressent d’abord à un homme. Un homme de chair et qui, de temps en temps expérimente les aléas de la finitude, de la souffrance. C’est à cet homme que j’écris. Oui, il porte la casquette du président, mais il reste humain. Je parie que la présidence de la République ne lui enlève pas son humanité.

Je lui demande de s’intéresser à ce qui se passe à Beni, au Kivu. Pourrait-il envisager une enquête sérieuse pour une justice adéquate ?  Si cet homme à qui j’écris est président de la République, il l’est pour gouverner les peuples. Et pourtant les morts se comptent en millions. 8 million de morts. Et chaque jour ce chiffre n’arrête pas de croitre. À ce rythme,  vous, cet homme, pourrez devenir le président des morts, le président des cimetières, le président des fausses communes. Cher président, les survivants de Beni, du Kivu se demandent s’ils font encore partie du territoire que vous êtes supposé gouverner…

Ces survivants et leurs amis sont encore nombreux. Chacun va vous écrire. S’il vous plait prenez le temps de lire leurs angoisses… Peuvent-ils encore compter sur vous ? Êtes-vous toujours apte et compétent pour entendre ces cris des humains de Beni. Si vous êtes toujours compétent alors que vous n’agissez pas, la logique de la complicité risque de vous voir accuser.
Merci pour l’attention que vous réservez déjà à cette lettre.

signé

Père Gaston Mumbere,
- Membre de la congrégation des Augustins de l’Assomption (Congrégation du père Vincent Machozi assassiné parce qu’il vous avait cité dans les massacres à l’Est du Congo, des Jean-Pierre Ndulani, Edmond Bamtupe, Anselme Wsukundi kidnappés depuis bientôt 3 ans)
- Membre du Mouvement Paix au Congo du Québec

P.s. Voici ce que j’écris sur l’enveloppe : Au président de la République Démocratique du Congo, à Kinshasa. J’espère que ma lettre arrivera à destination. De toute façon, je ne m’inquiète pas. Tout le monde connait bien ce pays et son président. Le pays est désormais connu. C’est la capitale mondiale du viol. La lettre devrait bien vous parvenir…