mardi 27 décembre 2016

Un peu de répit avant le prochain massacre



« Un peu de répit avant le prochain massacre. » Ces mots ont été exprimés dans une voix mélangée de colère, d’impuissance et peut-être d’espérance  par Alphonsine, la femme dont le témoignage porte le malheur de tout un peuple à l’Est de la République dite démocratique du Congo. C’était la veille de Noël, Alphonsine, commençait déjà à tourner les pages rouges qui ont marqué sa région de Beni par les égorgements depuis plus de deux ans. Elle vieillit et oriente déjà l’avenir des jeunes orphelins rescapés des massacres dans les dialogues de Kinshasa. « Peut-être j’ai fait une erreur d’y croire – croire aux dialogues – et d’y voir l’avenir pour ces jeunes rescapés », disait mélancoliquement Alphonsine.

La mélancolie ! Oui, c’est le sentiment qui habite les habitants du territoire de Beni qui pleurent les victimes de la machette. 25 personnes ont été précipitées brutalement à la mort le samedi 24 décembre. Comme Alphonsine, ces morts croyaient eux aussi aux dialogues. Mais leur foi fait défaut. Ils ne pourront plus célébrer Noël ici sur cette terre. Ils le feront peut-être là, loin des bottes où sont les autres qui les ont précédés. Leur nombre grandit chaque jour. 1000 ? 2000 ? Ça n’a pas d’importance ! Ils sont morts. Le plus important serait d’arrêter de compter…

Arrêter de compte! Oui… C’est un impératif qui s’impose et dispose ceux qui font des calculs à s’occuper de ce qui compte : la démocratie, la justice et la paix. Alphonsine s’étonne du consensus, de l’accommodement, des compromis qui sont mis en place pour encadrer le flou et le chaos dont les conséquences détruisent le tissu social, politique et économique de ses petits-enfants. Elle leur demande de croire en ce pays plein de potentiel et d’avenir… Mais pour le moment elle est à la croisée de chemins. Au même moment, elle assiste aux dialogues de compromis et aux massacres de ses proches.

Ce qui est sûr, Alphonsine n’a plus d’arguments pour ses petits-enfants qui hésitaient à croire aux dialogues… On leur demande de dialoguer pendant que les géants leur écrasent vifs les orteils dans un silence du consensus national ou international.

N’est-il pas le temps de vivre Noël pour vrai ? Se demande Alphonsine. C’est-à-dire vivre l’incarnation du Verbe qui habite parmi nous. Du dialogue qui parle de la vie ? Du dialogue qui parle de la réalité voilée de ce pays du Coltan. Car, et il faut le dire, le maintien au pouvoir des dirigeants actuels au-delà de leurs mandats constitutionnels se rattache en grande partie à l’exploitation de ressources minières de l’Est du pays. Le manque de fonds pour organiser les élections n’est qu’une mascarade – tout le monde le sait.

Pourquoi alors continuer à négocier la transition pour un homme illégitime et même illégal au lieu d’exiger son départ ? Les massacres de la veille de Noël seront-ils les derniers ? Ou c’est juste un répit ?
Trop c’est trop ! Le peuple souffre et la souffrance n’est pas leur destin. L’espoir se dessine dans l’action, autrement le prix des haricots va continuer à grimper.

Gaston Mumbere

vendredi 23 décembre 2016

Femmes violées, avenir volé, mémoire voilée








Faculté de théologie et de sciences des religions
Groupe de théologies africaines et subsahariennes (GTAS)
Monsieur Mumbere,
Le 2 décembre 2016, ce fut pour nous un grand plaisir de suivre votre communication au panel sur le thème “Improbable démocratie en RDC ?”. En développant la thématique « Femmes violées, avenir volé, mémoire voilée : l’impératif de libérer la parole », vous nous avez vraiment éclairés sur la situation de la démocratie au Congo, ce pays qui assiste avec douleurs et larmes au viol de ses filles, au vol de ses richesses minières et à l’extinction de la population dans sa partie orientale. 
Vos éclairages nous ont permis de saisir un peu mieux la complexité des contextes congolais afin de pouvoir élaborer sur cette partie d’Afrique une réflexion théologique engagée dans la lutte pour la libération de la personne humaine.
Une fois de plus, nous vous en remercions et souhaitons qu’advienne bien vite cette RDC nouvelle dont nous rêvons tous. 
            Lindbergh MONDÉSIR, Coordonnateur du GTAS